A la découverte d’Amina Weira et du documentaire humaniste nigérien

Alors que les couleurs du Niger étaient fièrement représentées à la 3ème édition du Ouaga Film Lab qui s’est déroulée cette semaine à Ouagadougou (20-29 septembre 2018) avec deux projets de films nigériens sélectionnés, nous avons rencontré la jeune cinéaste nigérienne Amina Weira.

Laboratoire de développement et de coproduction de projets cinématographiques, le Ouaga Film Lab a pour vocation de favoriser des rencontres entre experts de l’industrie cinématographique et audiovisuelle et jeunes talents du continent africain. Sélectionnée parmi les 10 projets de film en compétition cette année, Amina Weira a présenté son projet de film documentaire « Libre de partir, libre de rester » en collaboration avec Carine Stella Nzang Assoumou.

 

Concernée par la situation de sa région natale d’Agadez, Amina a souhaité, à travers ce documentaire, parler de ses racines tout en abordant les enjeux que représente l’application de la loi 2015-036 interdisant le trafic de migrants dans la région. Cet événement a suscité de violentes critiques aussi bien de la part des associations que de la population d’Agadez. Est-ce vraiment une solution au problème de l’immigration ? La loi est-elle applicable sans conduire à des dérives ? Les problématiques abordées sont nombreuses et complexes. Confrontation entre nomadisme et sédentarisation imposée, liberté et frontières, carrefour du commerce transsaharien et nœud de la migration internationale, ce film documentaire se veut engagé et sans complaisance. Tout au long d’un fil narratif à trois voix qui s’opposent et se rejoignent, parfois, Amina nous emmène à la rencontre de ce peuple pour comprendre les conséquences socio-économiques, politiques et sécuritaires de l’application de cette loi sur la cité d’Agadez.

Après des études en montage et en réalisations documentaires de création au Niger et au Sénégal, Amina a multiplié les formations pour parfaire sa maîtrise en réalisation de courts et longs métrages documentaires.

Restituer le réel à l’écran tout en parlant de son identité culturelle, c’est ce que souhaite faire Amina à travers le cinéma. « Touarègue déracinée », il est important pour elle de mettre sa culture en avant, de la valoriser tout en évoquant les risques actuels qui menacent sa survie.

« Aujourd’hui, je ne vis pas du cinéma, mais le cinéma est une arme pour m’affirmer, m’exprimer. Il m’offre la liberté de partager mes points de vue et mes préoccupations, provoquer des prises de conscience ».

Avec son précédent documentaire sorti en 2016, Amina démontrait déjà sa volonté de filmer pour parler du vécu, pour dire la vérité. Dans « La colère dans le vent », elle nous interpellait sur les effets dramatiques que l’exploitation de l’uranium a sur l’environnement et la santé des populations de la ville d’Arlit. En retraçant la vie de son père, elle nous fait découvrir les conditions de travail à la mine et les conditions de vie d’anciens travailleurs. La voix est aussi donnée aux jeunes, désireux de construire un avenir meilleur pour leur ville. Dénoncer et proposer, tel était l’objectif.

Ce film a reçu de nombreuses distinctions dont les plus récentes sont le « Prix Spécial Jury » du Green Image Film Festival de Tokyo de 2018 ou encore le « Prix du meilleur court et moyen métrage attribué par l’OIF » du Festival Vues d’Afrique au Canada en 2017.

Un talent à suivre …

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