So’ Fatoo, la marque sénégalaise qui redéfinit l’élégance

Créée en 2012 par la jeune styliste sénégalaise Fatima Zahra Ba, la marque So’Fatoo, à cheval entre le traditionnel et le moderne, se caractérise par des coupes simples, élégantes, mais aussi très branchées. Ayant participé à la prestigieuse Dakar Fashion Week de cette année, la créatrice de mode souhaite faire de sa bannière une référence internationale.

Chez Fatima Zahra Ba, le culte de l’élégance, c’est une histoire de famille. Dès son enfance, elle observait avec admiration sa grand-mère, enseignante, directrice d’école et gérante d’une entreprise de pagnes tissés, ainsi que sa tante paternelle, teinturière, combiner leurs vies professionnelles à leurs activités ludiques. Inspirée par ces femmes, elle comprend très vite qu’on peut allier les études, faire une brillante carrière, tout en étant coquette.

« Tout ce que vous vous sentez capable de faire et tout ce que vous aimez faire surtout, il faut le faire ». – Fatima Zahra Ba

À l’époque, elle confectionnait déjà des vêtements pour elle-même, avec des bouts de tissus dont sa mère n’avait pas besoin. Elle confie également qu’au cours de son adolescence, il lui arrivait de pleurer à chaudes larmes lorsqu’elle allait récupérer des habits chez le tailleur et qu’elle se rendait compte que celui-ci n’avait pas respecté le croquis qu’elle lui avait soumis à l’origine. Perfectionniste, la styliste a donc très tôt développé le sens du détail.

En 2012, alors qu’elle est en deuxième année d’études en droit à Meknès, au Maroc, elle fait une rencontre qui change sa vie. Elle fait alors la connaissance de Maria, une couturière marocaine dont l’atelier était situé non loin de son appartement. Au fur et à mesure qu’elle confie à Maria ses habits traditionnels pour quelques retouches, elle remarque que les compliments de son entourage se transforment rapidement en commandes. Ainsi naît l’aventure So’Fatoo, dans une chambre d’études, avec quelques sous en poche et des rêves plein la tête. Le nom de sa marque est d’ailleurs un clin d’œil à sa grand-mère, Fatou Sow, qui l’a grandement appuyée dès qu’elle a formulé son désir de se lancer dans la mode.

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Ainsi, la jeune styliste fait un pied de nez à l’imaginaire rattaché au prénom «Fatou». Désignant régulièrement la femme de ménage, et donc par extension, un personnage qui a rarement le temps de soigner son apparence, chez Fatima Zahra Ba, les Fatou sont à la base même de la société sénégalaise. Elles sont celles sur qui tout le monde compte pour être dans un environnement agréable, disposer d’habits propres et bien repassés et d’une maison impeccable. De fait, si les Fatou n’ont pas le temps de se chouchouter, c’est surtout parce qu’elles s’assurent que nous le soyons.

«So’FatoO, c’est un jeu de mots pour dire très moi, très africain. […] Je n’aimais pas cette dimension péjorative qu’on donnait à ce prénom et je me suis dit qu’il n’y a rien de mieux pour corriger cela que de passer par la mode. Je voulais montrer que les Fatou sont fortes et qu’elles sont élégantes. Elles sont tout ce qu’il y a de bon.» – Fatima Zahra Ba

Africaine, Sénégalaise, Halpulaar, musulmane, Fatima Zahra Ba revendique plusieurs identités. À son image, sa marque est donc un mélange unique d’influences et de vécus. D’après elle, la force So’Fatoo réside en sa simplicité, sa capacité à agencer autant de cultures, d’histoires, de lectures et de styles, tout en rendant le résultat final accessible à tous. De fait, on peut tout aussi bien porter ses créations au travail, à une cérémonie ou à l’occasion d’une sortie entre amis.

One of my favorite photographer but most importantly one of my best customer ! #IWearSofatoo

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Diplômée en droit public et en relations internationales, chargée des relations publiques auprès du ministère de la Femme, Fatima Zahra Ba s’est donc engagée dans le même sillon que sa grand-mère et sa tante. Elle est consciente qu’elle peut tout faire. Cet été, à la veille de la clôture des dossiers de candidature pour la Dakar Fashion Week, elle a donc décidé de tenter sa chance et d’envoyer une présentation de sa marque et de sa dernière collection, Laamu. Celle-ci est inspirée des rois et reines africains les plus influents.

«C’est la veille que j’ai osé envoyé ma candidature. Quand on m’a dit que c’était très beau et que j’allais participer, j’étais très fière et contente.» – Fatima Zahra Ba

Charmée par les coupes de cette collection, l’équipe d’Adama Paris, l’initiatrice de ce grand rendez-vous de la mode, valide son dossier et l’invite à présenter son travail lors d’un événement prévu à la résidence de l’ambassadeur de France à Dakar et lors d’une street parade dans le quartier de Niary Tally.

Cette expérience vient renforcer le souhait de la styliste de faire connaître sa marque à l’extérieur du pays. Ainsi, en octobre, elle se rend également à Accra pour participer à une Fashion Week. Déjà, en décembre 2016, So’Fatoo avait exposé ses créations au showroom de l’animatrice et entrepreneuse franco-sénégalaise Hapsatou Sy, dans le cadre du Marché des Créateurs.

Souhaitant ouvrir sa première boutique en 2018, à l’occasion du sixième anniversaire de sa bannière, la styliste veut développer l’image de celle-ci, et par la même occasion, redéfinir l’imaginaire associé au continent africain. De retour au Sénégal depuis 2016, prenant pour modèles tous les fils et filles de ce continent qui parviennent à s’illustrer malgré le manque de moyens, elle est convaincue que la plus grande réussite n’est pas financière. Pour Fatima Zahra Ba, on ne s’accomplit véritablement que si l’on arrive à se construire en tant qu’individu et à vivre en paix avec soi-même.

«Je pense que nous sommes particulièrement heureux par rapport au reste du monde. Je pense aussi qu’il y a plus d’opportunités ici que partout ailleurs dans le monde, justement parce qu’il y a tellement de choses à faire», confie-t-elle.

Être chez soi, entouré des personnes qu’on aime tout en faisant ce qu’on aime, pour la jeune styliste, il n’y a pas d’accomplissement plus grandiose.

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